Bon, voici un peu notre expérience dans l'ouverture de cette voie. D'abord laissons parler Chuck :
C'est lors de la première fois ou j'ai grimpé "grimpe dans l'piton" que j'ai aperçu l'arête ainsi que la grande face qui se situe quelque mètres à gauche du dernier pitch de celle-ci. N'ayant jamais participé à l'ouverture de voies, voyant mon ami Hugo ouvrir des chefs d'oeuvre, je me suis dit que ça serait un beau projet pour apprendre les rudiments de la brosse.Jamais j'aurais pensé que c'étais tant de travail et d'acharnement. Tout ces allés-retour dans la vallée à jumarer plusieurs dizaines de mètres juste pour nettoyer du cailloux et faire tomber des arbustes, déloger des blocs et pelleter des vires pour que les autres se salissent pas les chaussons Malgré tout j'ai eu beaucoup de plaisir a nettoyer cela. Arian me disait jour après jours qu'un classique devrait être aussi propre comme ma craque de fesses en sortant de la douche sinon ça ne serait pas un classique... Ses paroles m'ont gardé motivé juste qu'au dernier coup de brosse!Hum! Je ne me rappelle pas avoir parlé des classiques Chuck, mais c'est vrai que ta craque de fesses m'obsède
La première vue pour moi c'était aussi lors d'une ascension du Piton, en fait l'ouverture du dernier pitch avec L-P. On étudiait cette face de proche et elle nous semblait bien intéressante. Une longue étendue de roche avec beaucoup de texture mais pas de fissurage évident. Un bon candidat pour une ligne équipée?
Alors quelques années plus tard Chuck et moi sommes allés inspecter la ligne en rappel. De la fin du Piton, on a grimpé vers le sommet. Le bush était pas mal intense! Ça a pris beaucoup de temps pour le peu de distance traversé. Quand on est arrivés à un point où le bush était moins vertical on s'est dit qu'on était proche.
Alors on a dompé notre matériel et on a exploré... et en effet, le véritable sommet du Gros Bonnet n'était pas loin. Le sommet n'est pas grand et la vue sur la vallée est magnifique.
Ensuite on a commencé à chercher le haut de la longue face... un autre calvaire de bush. Mais enfin on a percé, on a posé un relais et on a commencé les rappels. Le rocher était très encourageant, la ligne offrait beaucoup de texture pour la plupart et seulement quelques passages semblaient incertains. Nous sommes partis fatigués mais heureux.
À notre visite suivante, nous avons fait des essais de grimpe dans le parties incertaines. Nous avons trouvé des solutions à chaque endroit, quelle joie j'ai senti à ce moment! Joie qui s'est vite calmé quand.... je me suis rappellé que le gros du travail était encore à faire
Alors on a commencé les travaux. Je dirait qu'à comparer avec d'autres projets, il y avait moins de brossage mais plus de gros blocs à dégager. Par exemple, on a fait une grosse journée au pied de la voie, il y avait une grande pile de frigos loose qui nous a pris des heures à clairer. Quel carnage dans le couloir! Les blocs ont rebondit loin.
Tranquilement, en 2013, les pitch se nettoyaient.... et s'équipaient... et la distance à jumarer à chaque visite baissait. (Celà rendait Chuck heureux, vu l'effort suprème que lui occasionnait son horrible setup de jumar.)
On a fini l'année avec un peu plus de la moitié de fait. Cette année on a éte beaucoup ralenti par la mauvaise météo mais on a réussi à finir le travail pareil. Durant la vingtaine de visites que ça aura pris, Charles et moi avons eut l'appui de plusieurs amis, notamment Anne-Marie Côté et Marco Perron, Serge Drolet, Charles Roberge et Jean-Claude Maurice. C'est tellement apprécié, les amis.
J'ai beaucoup appris en faisant ce projet. Côté équipage, j'espère que nous avons fait un travail correctement adapté à l'endroit. Certains passages me rappellent les voies de face très
runout de ma jeunesse, les trucs que l'on peut grimper à Joshua Tree, à Squamish ou à Tuolomne, où il faut faire fi de "Elle est où la prochaine plaquette?" et juste se concentrer sur les mouvements. À d'autres endroits c'est le crazy gneiss, unique comme il l'est, où ça prend douze techniques différentes pour faire 10 mètres de grimpe. Ça m'aura pris des années apprécier ce rocher, aujourd'hui je l'adore. Je crois qu'il fait de nous des plus forts grimpeurs.
Il reste quelques petits trucs à faire. Il y a encore un couple de gros blocs à dégager de la dalle au pied de la voie. Et ce serait super cool d'ouvrir une trail du haut de la voie, jusqu'au sommet du Gros Bonnet. On parle d'environ 100 mètres de branches à clairer, c'est pas gros! Mais bon pour moi ce sera pour une autre fois, j'accroche ma brosse pour un bout et je me remet à la grimpe.
En espérant que vous aurez beaucoup de plaisir sur cette ligne,
bonne grimpe et longue vie au Gros Bonnet!
Charles Lacroix
Arian Manchego